Libre Pensée du Pas-de-Calais

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Publié : 14 mars 2006

Leur bon dieu

1884, paroles : Eugène Pottier, musique : Émile Bouillon.

Au citoyen Joseph Durand, de Lyon

Dieu jaloux, sombre turlutaine [1] ,
Cauchemar d’enfants hébétés,
Il est temps, vieux croquemitaine,
De te dire tes vérités.
Le Ciel, l’Enfer : fables vieillottes,
Font sourire un libre penseur.
Bon dieu des bigotes,
Tu n’es qu’un farceur.

Tu nous fis enseigner par Rome
En face du disque vermeil,
Que Josué, foi d’astronome,
Un jour arrêta le soleil.
Ton monde, en six jours tu le bâcles,
0 tout-puissant Ignorantin.
Bon dieu des miracles,
Tu n’es qu’un crétin.

La guerre se fait par ton ordre,
On t’invoque dans les deux camps.
Comme à deux chiens prêts à se mordre,
Tu fais kss kss à ces brigands.
Les chefs assassins tu les sacres,
Tu les soûles de ta fureur.
Bon dieu des massacres,
Tu n’es qu’un sabreur !

On connaît tes capucinades [2]
Et l’on te voit, mon bel ami,
Te pourlécher des dragonnades.
Humer les Saint-Barthélémy.
Bûchers flambants font tes délices,
Tu fournis la torche à Rodin.
Bon dieu des supplices,
Tu n’est qu’un gredin.

Macaire [3] t’a graissé la patte.
Larrons en foire sont d’accord.
Saint Pierre tire la savate
Sitôt qu’on s’attaque au veau d’or.
Des compères de Bas-Empire,
C’est encor toi le plus marlou [4].,
Bon dieu des vampires,
Tu n’es qu’un filou.

Post-scriptum

Toutes les notes relatives au vocabulaire sont issus du site Le Trésor de la Langue Française Informatisé.

Notes

[1] Chanson populaire, refrain.

[2] Capucinade, subst. fém., péj., vieilli et fam. Sermon et, par extension, discours platement ou naïvement moralisateur, ressemblant aux sermons des capucins.

[3] MACAIRE, subst. masc. Vx. [P. allus. à Robert Macaire, brigand de mélodrame] Bandit, filou adroit et cynique.

[4] rusé, malin, fort