Libre Pensée du Pas-de-Calais

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Publié : 18 mai 2005

Comment l’Eglise catholique a imposé, impose et imposera ses dogmes aux institutions européennes.

La COMECE est la Commission des Episcopats de la Communauté Européenne, véritable lobby du Vatican auprès des institutions européennes.

Voici un morceau de bravoure de cléricalisme chrétien : publié en mars 2005, ce texte vante les mérites d’une constitution européenne permettant aux organisations chrétiennes d’intervenir dans la réflexion sur le modèle social européen. Et l’on sait que le modèle porté par l’Eglise catholique a conduit au bûcher et à l’intolérance fanatique. L’article I-52 est encore un aspect de la constitution qui va plus sûrement développer la discorde entre les citoyens que la concorde. -----

Source de cet extrait : Europe Infos Nr. 69 (3/2005) Europe Infos - Mensuel de la COMECE et de l’OCIPE, publié en français, allemand, anglais, espagnol et polonais

« A l’origine, les organisations ecclésiales européennes oeuvraient dans le cadre du modèle français de séparation de l’Eglise et de l’Etat. Elles se limitaient donc à être une présence auprès de la Communauté européenne. Mais au fil du temps, la jeune COMECE ainsi que d’autres organisations d’Eglise ont élaboré des moyens d’établir une méthode de dialogue entre la communauté ecclésiale et la société politique, comme le décrit l’Exhortation Apostolique Ecclesia in Europa (n°117). Avec les progrès réalisés en direction de l’achèvement du marché unique, la fin de la guerre froide et l’approfondissement de l’intégration politique, la dynamique fondatrice de l’Europe a rendu nécessaire d’explorer de nouveau les relations entre le marché et les objectifs politiques. Le défi lancé par Jacques Delors aux Eglises au début des années 1990, en leur demandant de s’impliquer dans le débat sur l’élaboration d’un modèle européen de société, a ouvert la voie à une pratique plus régulière d’échanges avec les institutions de l’Union. Finalement, cette coopération informelle a conduit à des jalons historiques tels que la Déclaration n°11 annexée au Traité d’Amsterdam et l’article 1-52 du Traité constitutionnel. »

COMMENTAIRE LIBRE PENSÉE 62 :

Ce texte est édifiant. Il indique bien que la tradition laïque française contenait les prétentions cléricales catholiques et que ce modèle a prévalu au niveau européen pendant quelques années. Il est intéressant de noter que c’est l’arrivée d’un Français, Jacques Delors, à la tête de la commission européenne qui va permettre à l’Eglise catholique, et aux autres, de développer leurs actions auprès des responsables politiques européens, dans l’opacité la plus complète. Il est vrai que ce personnage revendique sa filiation catholique et a toujours inscrit son action politique dans les orientations prônées par la doctrine sociale de l’Eglise catholique (subsidiarité, charité, respect de l’ordre social et économique, etc.). Et la direction nationale du PS se réfère le plus souvent possible à ses prises de position en le présentant comme un "sage" capable d’indiquer le chemin politique à suivre. Pour l’affirmation d’une laïcité institutionnelle, on repassera.

La COMECE se félicite aussi de l’adoption de la déclaration n°11 à Amsterdam qui reconnaissait les Eglises comme partenaires institutionnels de l’Union européenne : c’est Chirac et Jospin qui ont accepté cette "avancée" pour la laïcité en Europe. La laïcité, concept politiuqe central de la République, a donc été bradée consciemment par nos représentants politiques. Cela explique peut-être leur réaction lors la mort du pape en avril dernier... à moins que ce ne soit l’inverse. Cette déclaration est reprise intégralement dans le traité constitutionnel : c’est le fameux article I-52.

Voici un second extrait tiré de la même source

Il est tout aussi éclairant sur la pratique de la laïcité qu’ont nos représentants lors des travaux européens. De plus, il annonce clairement ce que vont faire les Eglises si le traité est ratifié : chercher à imposer leurs dogmes à tous.

« Les échanges réguliers qui ont évolué au cours des années entre les Eglises et l’Union européenne ont maintenant trouvé un fondement constitutionnel et l’assurance d’une qualité au sein du Traité constitutionnel, qui doit encore être ratifié. Les décennies d’interaction ont préparé la voie à un partenariat reposant sur un dialogue ouvert, transparent et régulier au service de la démocratie participative. Nos dirigeants et nos fonctionnaires européens savent viscéralement que la légitimité et la bonne gouvernance sont renforcées par le dialogue et les partenariats avec tous les acteurs de la société. Les Eglises et les traditions religieuses doivent prendre note du fait qu’il est plus urgent que jamais que l’anthropologie chrétienne commente le débat sur le modèle social européen et l’identité européenne. Elles doivent s’efforcer d’établir un partenariat au service de tous les Européens. »

COMMENTAIRE LIBRE PENSÉE 62 :

Tout benoîtement, le rédacteur de ce texte nous annonce que si le traité est ratifié, la reconnaissance des Eglises et de leur rôle sera CONSTITUTIONNALISÉ ("fondement constitutionnel"). Autrement dit, comme la révision de cette constitution est très improbable, la position acquise par les Eglises sera pérenne et ne pourra pas être remise en cause avant très longtemps. Mais, en plus, conformément à l’article I-6, cela primera notre droit national. De fait, les Eglises pourront s’appuyer sur cet article pour faire abroger par la jurisprudence européenne la loi de séparation des Eglises et de l’Etat française.

Autre aveu plutôt inquiétant : cela ouvre grand la porte au cléricalisme le plus débridé, et ce dans tous les domaines, puisque les Eglises vont "commenter le débat sur le modèle social européen et l’identité européenne." Cela signifie simplement que les Eglises vont entreprendre un lobbying forcené pour que les lois européennes appliquent leurs dogmes religieux : pas de (nouveaux) droits pour les femmes si ce n’est celui d’obéir et de subir, pas de droits pour les homosexuel(le)s et autres catégories pourchassées par la colère des Eglises, comme les athées, les libres penseurs, etc. Bref, la religion est de facto promue comme un moyen nécesaire pour faire régner l’ordre social et éviter les débordements populaires et revendicatifs. La preuve ? Leur action ne doit pas seulement concerner leurs ouailles respectives, mais "tous les Européens". Et voilà comment l’Eglise catholique avoue qu’elle n’a pas renoncé à imposer ses dogmes à tout un chacun quelles que soient ses convictions. Athée, agnostique, incroyant, indifférentiste et autres étrangetés de la nature religieuse n’ont qu’à bien se tenir, l’Eglise catholique va les sauver malgré eux !

Et dire que ce sont nos représentants qui ont oeuvré pour abandonner la laïcité institutionnelle en Europe ! Il est donc logique que l’Eglise catholique appelle à ratifier ce traité constitutionnel puisqu’il lui offre une arme juridique capable de détruire les avancées laïques obtenues par les peuples grâce à leurs luttes.