Libre Pensée du Pas-de-Calais

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Publié : 14 avril 2006

La butte rouge

1914-1918 ; Paroles de Montéhus, musique de Georges Krier.

Chanson emblématique de la grande boucherie de 14-18 ... La butte rouge, c’est la butte de Bapaume, en Champagne.

Sur cette butte là y’avait pas d’gigolettes [1]
Pas de marlous [2] ni de beaux muscadins [3].
Ah c’était loin du Moulin d’la Galette [4],
Et de Paname [5] qu’est le roi des patelins.
C’qu’elle en a bu du bon sang cette terre,
Sang d’ouvriers et sang de paysans,
Car les bandits qui sont cause des guerres
N’en meurent jamais, on n’tue qu’les innocents !

La butte rouge, c’est son nom, l’baptême s’fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd’hui y’a des vignes, il y pousse du raisin,
Qui boira d’ce vin là, boira l’sang des copains.

Sur cette butte là on n’y f’sait pas la noce
Comme à Montmartre où l’champagne coule à flots,
Mais les pauvr’s gars qu’avaient laissé des gosses
Y f’saient entendre de terribles sanglots ...
C’qu’elle en a bu des larmes cette terre,
Larmes d’ouvriers et larmes de paysans
Car les bandits qui sont cause des guerres
Ne pleurent jamais, car ce sont des tyrans !

La butte rouge, c’est son nom, l’baptême s’fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd’hui y’a des vignes, il y pousse du raisin,
Qui boit de ce vin là, boit les larmes des copains.

Sur cette butte là, on y r’fait des vendanges,
On y entend des cris et des chansons :
Filles et gars doucement qui échangent
Des mots d’amour qui donnent le frisson.
Peuvent-ils songer, dans leurs folles étreintes,
Qu’à cet endroit où s’échangent leurs baisers,
J’ai entendu la nuit monter des plaintes
Et j’y ai vu des gars au crâne brisé !

La butte rouge, c’est son nom, l’baptême s’fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd’hui y’a des vignes, il y pousse du raisin.
Mais moi j’y vois des croix portant l’nom des copains ...

Interprétée par Marc OGERET, Gérard GORSSE (2003), ...

Post-scriptum

Gaston MONTEHUS

Né le 9 juillet 1872, à Paris, MONTEHUS sera d’abord socialiste modéré. Il devient ensuite, vers 1906, un antimilitariste proche des positions de Gustave Hervé et de son journal "La Guerre Sociale". Mais dès qu’éclate la guerre, en 1914, il suit le virage de "l’union sacré" et du patriotisme. Franc-maçon, membre de la S.F.I.O, il obtient la légion d’honneur en 1947. Il meurt en décembre 1952.

Notes

[1] Gigolette : féminin de gigolo

[2] Marlou : voyou.

[3] Muscadin : jeune bourgeois parfumé au musc.

[4] Moulin de la Galette : Ancien moulin à vent devenu bal populaire à la fin du XIXième siècle.

[5] Paname : Paris, en argot